Plusieurs hypothèses de corps anarchistes ont été évoquées lors de la première séance : récalcitrant, déhiérarchisé, illisible, sans fondement, désirant et débordant. Loin de constituer de nouvelles catégories, cet exercice d’anatomie à partir des œuvres a davantage révélé des qualités, ou des facultés, ouvertes à la libre association.
Cette nouvelle séance propose d’explorer de manière plus approfondie l’hypothèse d’un « corps mutualiste ». À travers une conversation avec Catalina Insignares et Myriam Lefkowitz autour de leur projet en cours intitulé la facultad, nous débattrons de l’articulation entre art et soin, de mutualité et d’entraide, d’un toucher qui ne peut être régulé, d’une réciprocité des savoirs, de la possibilité de faire danser l’anatomie en explorant de nouvelles cartographies du corps et une « aptitude à toucher à travers les autres, des autres à toucher à travers toi, à toucher les autres qui te touchent » (Moten&Harney, The Undercommons : Fugitive Planning and Black Study).
La facultad a été initiée à La Galerie-centre d’art contemporain de Noisy-le-Sec, poursuivie au Pacifique-CCN de Grenoble, et sera développée à Bétonsalon dans les mois qui viennent. Ce « cabinet de pratiques » conçu par Catalina Insignares et Myriam Lefkowitz s’adresse à des personnes exilées et à leurs accompagnant·e·s. Il mêle pratiques somatiques, chorégraphiques ou énergétiques, parfois influencées par la lecture du tarot, l’hypnose ou encore la télépathie – autant de médiums qu’elles déploient pour expérimenter d’autres formes de relation à soi, aux autres et à notre environnement social.
« À travers ces expériences sensorielles, on peut inventer ensemble des moyens de communiquer qui passent par le corps, l’imagination et la mémoire – des moyens qui ne sont pas dépendants de la langue et qui peuvent s’inventer avec nos différences – pas contre elles, pas sans elles, avec elles.
L’art pour la facultad deviendrait alors un endroit où on invente des outils de communication et où on se met à raconter d’autres histoires au sujet de qui on est, d’où on est, et de ce que le futur pourrait être. »