Événements
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LE CORPS ANARCHISTE : ANATOMIE DES ASSOCIATIONS VOLONTAIRES
Un cycle de rencontres, par Julie Pellegrin
Henrik Olesen, Some Illustrations to the Life of Alan Turing, 2008, série de seize, impression jet d’encre sur papier journal, 33 x 48 cm chacune (détail), courtesy Galerie Buchholz, Berlin/Cologne/New York
Dans le cadre de son livre à venir sur les politiques de la performance contemporaine, Julie Pellegrin explore l’hypothèse d’une relation entre pratiques performatives et anarchistes. Avec ce cycle de rencontres, elle propose de se livrer à un exercice d’anatomie spéculative à partir des « Membres et l’Estomac » et de la fiction de corps dissocié suggérée par la fable de la Fontaine.
En bon moraliste, Jean de La Fontaine a tôt fait de rappeler les grévistes à l’ordre et de les remettre dans le droit chemin – celui du travail et du corps de l’État. Mais si les membres n’avaient pas obéi, quelle anatomie alternative auraient-il pu générer ? En refusant de faire corps avec l’autorité, quelles alliances inédites auraient-il pu imaginer ? Ce corps décomposé puis recomposé selon un principe de libre association aurait-il pu être qualifié d’anarchiste ?
La métaphore organique, convoquée dans la fable, entre corps individuel et social a connu un succès croissant depuis le XIXe siècle, y compris chez les anarchistes. Mais pour ces derniers, elle permet de repenser le rapport entre individu et société en termes d’interdépendance, et non d’opposition ou de représentation.
Certaines pratiques artistiques nous proposent des formes non-hiérarchiques de relation à soi et à la communauté, à travers un travail complexe de composition. Cette première séance sera l’occasion de penser avec elles pour comprendre quels corps ingouvernables elles rendent possibles, et de mettre sur la table quelques éléments de réflexion autour du refus, du désordre, de l’hétérogénéité, du libre arbitre et de la réciprocité.
Jeudi 27 mai, 18h
Conférence Scène d’exposition par Julie Pellegrin
Pauline Boudry / Renate Lorenz, Moving Backwards, 2019, installation avec film 16mm transféré sur DVD et 47 photographies, 15 min, courtesy Marcelle Alix, Paris et Ellen de Bruijne Projects, Amsterdam
Jeudi 10 juin, 18h
Le corps mutualiste, conversation avec la facultad – Myriam Lefkowitz et Catalina Insignares
© Jean-Philippe Derail
Plusieurs hypothèses de corps anarchistes ont été évoquées lors de la première séance : récalcitrant, déhiérarchisé, illisible, sans fondement, désirant et débordant. Loin de constituer de nouvelles catégories, cet exercice d’anatomie à partir des œuvres a davantage révélé des qualités, ou des facultés, ouvertes à la libre association.
Cette nouvelle séance propose d’explorer de manière plus approfondie l’hypothèse d’un « corps mutualiste ». À travers une conversation avec Catalina Insignares et Myriam Lefkowitz autour de leur projet en cours intitulé la facultad, nous débattrons de l’articulation entre art et soin, de mutualité et d’entraide, d’un toucher qui ne peut être régulé, d’une réciprocité des savoirs, de la possibilité de faire danser l’anatomie en explorant de nouvelles cartographies du corps et une « aptitude à toucher à travers les autres, des autres à toucher à travers toi, à toucher les autres qui te touchent » (Moten&Harney, The Undercommons : Fugitive Planning and Black Study).
La facultad a été initiée à La Galerie-centre d’art contemporain de Noisy-le-Sec, poursuivie au Pacifique-CCN de Grenoble, et sera développée à Bétonsalon dans les mois qui viennent. Ce « cabinet de pratiques » conçu par Catalina Insignares et Myriam Lefkowitz s’adresse à des personnes exilées et à leurs accompagnant·e·s. Il mêle pratiques somatiques, chorégraphiques ou énergétiques, parfois influencées par la lecture du tarot, l’hypnose ou encore la télépathie – autant de médiums qu’elles déploient pour expérimenter d’autres formes de relation à soi, aux autres et à notre environnement social.
« À travers ces expériences sensorielles, on peut inventer ensemble des moyens de communiquer qui passent par le corps, l’imagination et la mémoire – des moyens qui ne sont pas dépendants de la langue et qui peuvent s’inventer avec nos différences – pas contre elles, pas sans elles, avec elles.
L’art pour la facultad deviendrait alors un endroit où on invente des outils de communication et où on se met à raconter d’autres histoires au sujet de qui on est, d’où on est, et de ce que le futur pourrait être. »
Jeudi 24 juin, 18h
Le corps autodéterminé, conversation avec Kapwani Kiwanga
Cette troisième séance propose d’examiner la notion ambivalente d’autodétermination à l’aune du travail de Kapwani Kiwanga. Nous reviendrons avec l’artiste sur sa pratique de conférences-performances en faisant quelques détours par d’autres œuvres (d’Ujamaa et la villagisation socialiste en Tanzanie à The Marias et le droit des femmes à disposer de leur corps) pour tenter de tisser des liens entre autodétermination des corps et modes de vie en autogestion, entre domination, soin et savoirs sur les corps, et entre corps aliénés, aliens et cyborgs.
Fidèles à l’approche spéculative et anthropologique de Kapwani Kiwanga, nous discuterons de la manière dont des opérations esthétiques de l’ordre de la désidentification, de l’assemblage et de l’anachronisme peuvent offrir des pistes de réflexion pour un corps – social ou individuel – autodéterminé.
Kapwani Kiwanga présente actuellement l’exposition Cima Cima au Crédac - Centre d’art contemporain d’Ivry (jusqu’au 11 juillet 2021).
Jeudi 8 juillet, 18h
Le corps non performant, conversation avec Béatrice Balcou
Béatrice Balcou, Container #08 (Ctenolepisma longicaudata & Henri Matisse), 2020
Image © Julie Pellegrin, vernissage de l’exposition L’usage des richesses, Salle Principale, Paris
Cette quatrième et dernière séance sera l’occasion d’un échange avec Béatrice Balcou autour de ses œuvres récentes et de la parution de l’importante monographie qui lui est consacrée par MER. Paper Kunsthalle*.
Dans sa conférence, « Blackness and non-performance » donnée au Moma en 2015, le poète et théoricien Fred Moten formulait le concept de « non-performance ». Celle-ci ne désigne pas tant un refus de performer qu’un refus qualifié – hautement stratégique et politique – de performer selon les rationalités normatives qui conditionnent et imposent leurs propres logiques comme les seules possibles et autorisées.
Pour tenter d’appréhender le travail de Béatrice Balcou par le prisme de cette idée, nous effectuerons des allers-retours entre de singulières sculptures de verre renfermant des restes d’œuvres d’art ou des insectes « dévoreurs de patrimoines », un livre à paraître qui met en pièces l’idée-même de monographie pour mieux la réinventer, des cérémonies réalisées sans public, et d’autres « non-performances » en cours de préparation. Nous verrons comment, en travaillant contre et à travers un ensemble de contraintes (économiques, physiques, sociales, matérielles, symboliques, etc.), l’artiste multiplie les variations sur le thème du refus et propose, simultanément, des alternatives qui instituent leurs propres règles. Enfin, nous examinerons ses stratégies artistiques faites de ralentissement, d’opacité, d’anonymat, d’improductivité, d’échelle réduite et de vulnérabilité assumés, pour identifier la manière dont les corps – le sien, celui du public, celui des objets ou d’autres êtres non-humains – résistent aux injonctions de performance néo-libérales.
*La rencontre sera suivie du lancement officiel de la publication Ceremonies &. L’ouvrage revient sur l’ensemble des Cérémonies (2013-2020) en conjuguant les protocoles écrits par l’artiste, des textes d’auteur.rices (Vanessa Desclaux, Christophe Gallois, Zoë Gray, Béatrice Gross, Julie Pellegrin, Émilie Renard, Septembre Tiberghien et Eva Wittocx), ainsi que des correspondances avec des artistes, responsables de collection, galeristes ou éditeur.rices – en autant de perspectives à travers lesquelles on peut suivre la chorégraphie tissée par ces singulières performances, entre gestes de travail et gestes de soin.
THE BOOK CLUB
Conception : Myriam Lefkowitz et Cécile Lavergne, en discussion avec Igor Krtolica
Créé en collaboration avec les artistes Jean-Philippe Derail, Thierry Grapotte, Catalina Insignares, Julie Laporte, Florian Richaud, Yasmine Youcef
© Carol Lefkowitz
The Book Club propose une expérience de lecture sous la forme d’un dialogue entre Myriam Lefkowitz et un.e visiteur.euse, invité.e à s’allonger et à fermer les yeux durant une heure : une tentative d’accordage qui prend sa source dans le partage d’un état modifié d’attention, proche de l’induction hypnotique.
Rassemblant un corpus de textes philosophiques mettant tous en jeu des alliances spécifiques entre humains et non humains, The Book Club est une expérimentation à deux voix qui spécule une forme de lecture où penser, sentir, imaginer, rêver, s’émouvoir... s’associent et génèrent un mode de compréhension et de pensée alternatifs – autant de nouvelles facultés pour appréhender le monde qui vient.
Séances d’une heure à 11h et à 14h
du mardi 15 au vendredi 18 juin
du lundi 21 au jeudi 24 juin
du lundi 28 au mercredi 30 juin
du lundi 12 au jeudi 15 juillet
Pour toute information : publics@betonsalon.net
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